Être le peuple qu’Allah aime : Réflexion sur Sourate Muhammad (47:38)

Les appartements (Al-Ĥujurāt):6 - ô vous qui avez cru ! Si un dépravé vous apporte une nouvelle, voyez bien clair [de crainte] que par inadvertance vous ne portiez atteinte à des gens et que vous ne regrettiez par la suite ce que vous avez fait.
Le verset 49:6 a été révélé après qu’Al-Walid ibnou Ouqba, envoyé du Prophèteﷺ, ait rapporté à tort que la tribu des Banu al-Mustalaq avait renié l’islam. Le Prophète envoya alors Khalid ibn al-Walid pour vérifier la situation. Khalid confirma que la tribu était toujours musulmane, ce qui montra l’importance de ne pas croire immédiatement une information venant d’une personne peu fiable mais de toujours la vérifier avant d’agir. Le Prophèteﷺ disait : « La patience vient d’Allah, la précipitation vient du Chaytan. »
Ce verset comporte sept points :
Le verset : « Ô vous qui avez cru, si un pervers vous apporte une nouvelle… »
Il est dit que ce verset fut révélé à propos d’Al-Walid ibnou OUqba ibn Abi Mou'îyt. La raison en est ce que rapporta Sa‘id de Qatadah : Le Prophète (paix et bénédictions sur lui) envoya Al-Walid ibn ‘Uqba comme vérificateur auprès des Banou al-Mustalaq. Lorsqu’ils le virent, ils s’avancèrent vers lui et il les craignit dans une autre version, à cause d’un différend qu’il avait avec eux puis il retourna auprès du Prophète (paix et bénédictions sur lui) et lui rapporta qu’ils étaient apostats de l’Islam.
Alors, le Messager d’Allah (paix et bénédictions sur lui) envoya Khalid ibnou al-Walid avec l’ordre de vérifier les faits et de ne pas agir précipitamment. Khalid partit et les rencontra de nuit puis envoya ses éclaireurs. Ils lui rapportèrent qu’ils tenaient fermement à l’Islam, entendaient l’appel à la prière et accomplissaient leurs prières. Le lendemain, Khalid vint les voir et constata la véracité de leur attachement à l’Islam puis retourna informer le Prophète (paix et bénédictions sur lui) et ce verset fut alors révélé.
Le Prophèteﷺ disait alors : « La patience vient d’Allah et la précipitation vient du Diable. »
Dans une autre version, le Prophète (paix et bénédictions sur lui) l’avait envoyé aux Banou al-Mustalaq après leur conversion à l’Islam. Lorsqu’ils apprirent son arrivée, ils partirent à sa rencontre mais il les craignit. Il retourna alors au Messager d’Allah (paix et bénédictions sur lui) en lui disant que le peuple avait envisagé de le tuer et qu’ils avaient refusé de lui remettre la zakat. Le Messager d’Allah comprit qu’ils s’étaient révoltés. Alors qu’ils étaient dans cet état, leur délégation vint au Prophète et dit :
« Ô Messager d’Allah, nous avons entendu parler de ton envoyé, nous sommes venus l’honorer et lui remettre la zakat que nous avons acceptée. »
Puis il retourna en arrière et il nous est parvenu qu’il prétendait au Prophète que leur départ était pour le combattre, alors qu’ils ne sont pas partis pour cela. Allah révéla alors ce verset.
On a appelé Al-Walid « fâsiq », c’est-à-dire menteur. Ibnou Zayd, Muqatil et Sahl ibnou Abdullah disent : Le « fâsiq » est le menteur. Abu al-Hasan al-Warraq dit : C’est celui qui manifeste son péché. Ibnou Tâhir dit : C’est celui qui ne craint pas Allah. Hamza et al-Kisai ont lu le mot « فتثبتوا » (faites preuve d’attentivité) au lieu de « فتبينوا » (vérifiez). Les autres ont lu « فتبينوا » qui vient de « التبيين » (clarification). Le mot « أن تصيبوا » signifie ici « afin que vous ne frappiez pas » ; le « أن » est au cas d’accusatif à cause de la suppression du mot « الخافض ». « قوما بجهالة » signifie « par erreur ». « فتصبحوا على ما فعلتم نادمين » signifie « et que vous vous réveilliez avec regret pour ce que vous avez fait » c’est-à-dire à cause de la précipitation et du manque de patience.
Ce verset prouve qu’il est permis de croire à un témoignage isolé s’il émane d’une personne juste. En effet, il ordonne la vérification lorsqu’une information provient d’un « fâsiq » (pécheur), ce qui implique que l’information d’un juste est recevable. Le consensus (idjma) sur l’invalidité des informations isolées est donc invalide. En effet, la parole est une confiance et la perversité annule cette confiance. Le consensus a néanmoins fait une exception pour ce qui concerne les revendications, le déni ou l’attribution d’un droit à autrui. Par exemple, si quelqu’un dit : « Ceci est mon esclave », sa parole est acceptée. Ou s’il dit : « Untel m’a donné ceci en cadeau », c’est aussi accepté. De même, la parole d’un non-croyant est acceptée dans ce genre de cas. Aussi, si quelqu’un reconnaît un droit d’autrui sur lui-même, cela ne brise pas le consensus.
Concernant la nomination d’un tuteur pour un mariage, selon Al-Shafi‘i et d’autres, un « fâsiq » ne peut pas être tuteur, mais selon Abu Hanifa et Malik, il peut l’être car il protège les biens et la dignité même s’il est pécheur dans sa religion. Par conséquent, s’il administre les biens, il est plus apte à tutorer le mariage, qui est lié à la protection de ces biens.
Ibnou al-Arabi dit qu’il est étonnant que selon Al-Shafi‘i et ses partisans, un « fâsiq » puisse diriger la prière (imam). Ceux qui ne sont pas dignes de confiance pour garder une petite quantité d’argent ne peuvent être dignes de confiance pour garder une grande affaire religieuse. Cela vient du fait que les dirigeants qui menaient la prière à l’époque avaient des pratiques déviantes mais il était impossible de laisser la prière sans imam. Ainsi, il fallait prier derrière eux. Comme disait Ousman : « La prière est la meilleure œuvre des gens. Si elle est bien faite, participez-y et si elle est mal faite, évitez ce qui est mauvais. » Certaines personnes priaient avec eux par prudence (taqiyya), puis refaisaient la prière en secret, d’autres considéraient cela comme leur prière. Quant à moi, je pense que la répétition est obligatoire. Personne ne devrait abandonner la prière derrière un imam qu’il désapprouve, mais il devrait refaire la prière secrètement.
Concernant ses jugements, s’il est en position d’autorité, il faut appliquer ce qui est conforme à la vérité et rejeter ce qui est contraire. On ne doit pas annuler ce qu’il a validé, ni se soucier des paroles rapportées qui pourraient lui nuire. Il y a beaucoup de discours sur ce sujet mais la vérité est claire.
Il n’y a aucun doute que ce « fâsiq » peut être envoyé comme représentant pour transmettre un message, un ordre ou une autorisation, s’il reste dans le cadre de la vérité et de l’autorité du donneur d’ordre. Si cela concerne un droit qui ne lui appartient pas, sa parole n’est pas acceptée. Cela est permis par nécessité, car si seuls les justes transmettaient, beaucoup de choses ne seraient pas réalisées faute de personnes compétentes. Allah est le Plus Savant.
Ce verset réfute l’idée selon laquelle tous les musulmans sont justes sauf preuve contraire. Allah ordonne ici la vérification avant d’accepter une information. Cela n’a pas de sens de vérifier après avoir agi sur une information. Juger avant vérification, c’est infliger un tort par ignorance à celui qui est jugé.
Si le jugement repose sur ce qui est le plus probable, il ne s’agit pas d’un acte fait par ignorance, par exemple juger d’après deux témoins justes ou la parole d’un savant. Mais agir sur la parole d’une personne dont on ne peut établir la véracité relève de l’ignorance. Cette question a été traitée par Al-Qushayri et acceptée par Al-Mahdawi.
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